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Les tribulations de la Marquise

2 septembre 2013

Métro XI.

Métro XI.

                                     

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"Votre pays n'est plus."

Une voix sortie des hauts-parleurs nichés dans les arbres de la forêt accompagnèrent le retour de Renée parmi ceux qu'elles devaient considérer à présent comme les siens. Kiki le caniche allait lui manquer, pensa-t-elle fugacement avant de poser les yeux sur Ysabel qui était miraculeusement revenue à la vie et de se sentir à nouveau légère et heureuse. Ce qui n'était pas le cas de ses compagnons d'infortune, constata-t-elle amérement devant les regards chargé de haine qu'ils lui lançaient tous.

- Je peux tout vous expliquer, bredouilla-t-elle.

Elle n'en avait pas besoin, un écran de cinéma derrière les arbres s'en était chargé à sa place, montrant toute la scène aux huit personnes restées dans la clairière. Huit personnes qui risquaient de vouloir se faire vengeance sous peu.

- Avez-vous pensé ne serait-ce qu'une seule seconde aux gens auxquels nous tenons ?

Emilie ne se sentait, pour sa part, pas particulièrement triste. Mais la perspective de se défouler de toute la rage et la frustration qu'elle ressentait, par contre, la motivait un peu plus.

- Ma femme, ma télé, mon chien...

Richard pleurait silencieusement (enfin plus vraiment silencieusement) la perte de ce qu'il avait aimé et qui avait disparu dans une détonation nucléaire. Il releva la tête, retroussa les manches de sa chemise, et se dirigea à pas lents vers Renée qui se servait de sa petite fille comme d'un bouclier, comme pour justifier l'acte irréparable qu'elle venait de commettre.

- Ne vous approchez pas !

L'invective ne perturba aucunement l'homme, qui finit par se planter devant le visage de la vieille dame.

- Je vous hais.

Le premier coup partit, fulgurant, déchirant le silence spectral de la clairière et éclatant l'arrête nasale de celle qui avait causé la perte de sa patrie.

Ysabel hurla, puis finit par se réfugier dans les bras d'Emilie qui observait le massacre de Renée en silence, le regard dur, se complaisant dans l'explosion de violence et se déléctant du sang qui giclait de ce qu'il restait de la boîte cranienne de la vieille femme. Elle en reçut une goutte sur l'index qu'elle se retint de porter à ses lèvres...

Eric avait tenté d'arrêter Richard puis avait décidé de prendre part au joyeux massacre en décrochant des coups de pieds dans le thorax de Renée, la faisant s'étouffer dans son propre sang avant de rendre l'âme, heureusement pour elle, quelques minutes plus tard.

Les autres n'avaient pas plus esquissé le moindre mouvement qu'Emilie, fasciné par le spectacle, même Brunhilde avait ressentit avec une pointe de culpabilité une forme de plaisir morbide à faire payer une dame âgée pour la destruction de la France. Bien qu'elle ne s'en plaignait absolument pas, étant donné que son mari qui la battait comme plâtre du matin au soir était la seule chose qui l'y attendait.

"Vous n'avez même plus besoin de nous pour vous entretuer, vous êtes vraiment géniaux les humains !"

Une voix synthétique résonna à nouveau dans les enceintes, détournant l'attention de ce qu'il restait de Renée.

"Je crois que vous êtes fin prêts pour entrer dans le temple de l'amour !" 

 

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27 avril 2013

Métro X.

Métro X.

 

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- Prenez-moi ! FAITES LA REVENIR ! Ne me laissez pas seule, je vous en supplie...

Le reste de sa phrase s'était terminé par un gargouillement étrange. Prostrée, à genoux face à la recette, elle releva la tête lorsqu'elle constata que les bruits alentours s'étaient tus. Elle était seule, face à l'image de sa petite fille, dans une sorte de gigantesque ascenseur blanc qui lui fit songer à l'image qu'elle se faisait du purgatoire. Dieu allait-il se montrer ? Méritait-elle sa clémence ?

- Combien de personnes laisserais-tu mourir pour elle ?

Un rat géant venait de lui poser la question, campé sur ses pattes arrières, René crut que son coeur allait exploser tant l'adrenaline le faisait battre à pleine vitesse.

Elle frotta ses yeux, rougis par les larmes, et tenta de réfléchir. Combien de personnes ? Au moins l'équivalent de la France, pensa-t-elle avec une pointe de culpabilité.

- Très bien, murmura le rat.

Les commandes d'un missile apparurent alors devant Renée. Elle vit sur l'écran de contrôle l'Elysée et songea à son président, qu'elle haissait. Elle, elle avait voté pour Dupont-Aignan, par nostalgie du général de Gaulle. Bon Dieu, ce que cet homme avat alimenté ses fantasmes les plus obscurs... Mais là n'était pas la question. Elle appuya sur le bouton rouge et ferma les yeux.

Amandine, quinze ans, se maquillait grossièrement dans les toilettes de son collège, espérant que Lucas la remarque enfin.

Jérôme, six mois, se réveillait peu à peu dans la douce lumière du jour.

Hugo, soixante-dix ans, donnait à manger aux pigeons du parc où il passait ses journées, n'ayant rien d'autre depuis la mort de Lucette.

Victorien, vingt-quatre ans, regardait avec amour ses chiens qui mangeaient leur pâtée du matin en remuant joyeusement la queue.

Yann, trente ans, écoutait du métal dans sa mercedes coupé sport. Une tradition pour lui qui était chef de rayon à Décathlon et qui rêvait de devenir une rock-star.

Marie, quarante-deux ans, songeait avec tristesse à la mort de son mari, militaire au Mali, mort pour la France, mort pour rien.

Rémi, six ans, triait ses cartes pokémon sur la route de l'école et se réjouissait d'avance de sa victoire probable. Depuis qu'il était tombé sur la carte Mewtwo, c'était le jackpot en cour de recré !

Et les quelques 65 millions d'autres. 

Tous furent anéanti par une bombe nucléaire lancée par une grand-mère au désespoir.

24 avril 2013

Métro IX.

Métro IX.

 

 

 

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Debbie pleurait silencieusement, assise contre un arbre, la disparition de son ami et amant. Elle ne sentait presque plus son visage tellement les larmes y avaient creusé de profonds sillons salés. C'était une perte sans nom pour la jeune fille, qui se sentait presque mourir à son tour. Même les bras réconfortants d'Adrien n'y changeaient rien. 

Renée était tombée dans les pommes. Ou avait fait un arrêt cardiaque, les autres membres de l'équipe ne savaient plus très bien et n'avaient pas très envie de la réveiller pour l'entendre brailler la perte de sa petite fille et l'ingestion inattendue de ce qu'il en restait.

Emilie soupirait, terrifiée par les bruits de la forêt. Le hululement d'une chouette la fit sursauter comme jamais. Et le souvenir de la petite Ysabel semblait vouloir la hanter pour les mille ans à venir.

Brunhilde serrait ses enfants contre elle, profondément touchée par la détresse de la grand-mère et par la perspective de perdre elle aussi ses proches. Une larme coula le long de sa joue, solitaire. A son image.

Richard sentait ses sentiments s'envoler les uns après les autres. Plus rien ne semblait vouloir le toucher, l'atteindre ou lui faire du mal. Résigné, il attendait la venue de la faucheuse avec une appréhension teintée d'espoir. La mort ne valait-elle pas mieux que ça ?

Eric, en manque de cocaïne, l'esprit embrumé et prêt à s'effondrer à chaque moment, tentait d'analyser la situation avec pragmatisme. Peine perdue, il songea un instant à sortir son revolver et se l'appliquer sur la tempe mais il avait oublié sa malette dans le champs ensoleillé de vert. La fuite était impossible. A moins que... ce caillou ?

Les neufs attendaient devant le panneau de la recette qu'on leur dicte les prochains évènement. Totalement embarqué contre leur volonté, et à présent totalement serviles, cloués au sol par la peur, Il pouvait en faire ce qu'il voulait. Il avait hâte de la suite des évènements, et le visage baigné de larmes de la jeune Emilie provoquait des réactions incontrolables chez lui. Ainsi que la détresse de Brunhilde, l'indifférence de Richard, le manque d'Eric... Tout le fascinait chez ces gens. En souriant sadiquement, Il pensa à la prochaine épreuve.  

 

23 avril 2013

Métro VIII.

Métro VIII.

 

 

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Une fois la vieille dame plus ou moins calmée, le temps fut venu de quitter le restaurant. Renée sanglotait toujours bruyamment, ce qui énervait beaucoup le reste de l'équipe trop habituée aux morts successives et à la leur qui semblait vouloir arriver le plus vite possible pour être réellement compatissants. 

Emilie se demandait ce qu'allait être leur prochaine épreuve. Elle aurait voulu pouvoir s'attendre à une chose logique, une étape à passer, mais pas une séléction totalement aléatoire de chacun d'entre eux. Etaient-ils les proies d'un pervers, à la manière d'un Saw ou d'un survival horror quelquonque ? Elle en avait de plus en plus l'intime conviction. Et elle voulait survivre jusqu'à la fin, fut-ce en écrasant tous les autres. Elle serra les poings et les dents puis ouvrit la porte d'entrée du restaurant. 

Ils se retrouvèrent en plein milieu d'un buffet entre gens élégamment habillés et le restaurant disparut quand le dernier d'entre eux en eu passé les portes.

- Bienvenue !

Un jeune stewart et une hôtesse déguisée en lapin leur tendaient des plateaux remplis de petits fours. Debbie jeta un oeil à ses deux amis, redoutant un autre plat empoisonné, amis qui semblaient partager la même crainte. 

- On est obligé de manger ?

Heidi, la petite fille de Brunhilde, avait posé la question avec toute la naïveté un peu consternante que l'on observe à cet âge là et les serveurs ne firent que tendre un peu plus le plateau vers les dix protagonistes. En revanche, le reste des personnes présentes au cocktail se tournèrent au même moment vers eux et les fixèrent d'un regard si noir qu'Eric crut qu'il allait se pisser dessus. Depuis que la bourse avait chutée en 92, il n'avait pas éprouvé une sensation aussi terrifiante. 

- Je vais en prendre un bout, marmonna Richard en attrapant un toast. 

- Mais tu es fou ! 

Debbie avait crié, paniquée, et s'était attirée tous les regards des êtres aux alentours. Il lui semblait d'ailleurs que leurs yeux étaient des puits sans fond dans lesquels elle aurait pu se noyer aisémment. 

- Pardon... Je vais en prendre un aussi.

La mort dans l'âme, elle saisit un morceau et le mangea rapidement. Le goût ne lui disait rien, il lui rappelait à la fois le poulet et le lapin... Sans être l'un ou l'autre.

Ils se saisirent tous des petits fours, à part le seul qui mangeait Hallal, ne sachant pas ce qu'il y avait dedans il ne préférait pas s'y risquer et ce malgré les regards insistants de toute l'assistance.

Il y eut alors un flash blanc. Et quand les yeux des dix se réacoutumèrent à la lumière ils constatèrent qu'Ahmed, l'ami de Debbie, avait disparu. Ils se trouvaient dans une forêt, et à l'arbre le plus proche était punaisé un papier. Plus exactement une recette, celle des petits fours ; dans la partie viande étaient inscrits les noms et prénoms de la petite fille de Renée.

17 avril 2013

Métro VII.

Métro VII.

 

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... Et se sentit plongée dans un profond coma. Le monde autour d'elle s'évanouit pour laisser place à des pixels grossiers sur fond blanc, sans aucune raison. A moins que... des pâtes hallucinogènes ? La mort ?

Le coeur du chef d'entreprise s'emballa aussitôt quand il vit que la jeune fille venait de s'effondrer. Brunhilde posa rapidement sa main sur son cou pour en saisir le poul et en déduit un arrêt cardiaque. 

Lorsqu'elle l'annonça au reste de l'équipe, ils ne purent s'empêcher de s'en sentir soulagés. Les enfants ne bronchèrent pas devant la mort d'Emilie, trop accoutumés à cet événement.
 
- On ne va pas dire que ce n'est pas triste, murmura Renée, mais... Je pense que quelque part, nous sommes heureux que le sort ne nous ai pas choisis à sa place.
 
Devant cette verité évidente, ils ne purent que baisser la tête en signe d'assentiment. 
 
- Je mange moi !
 
Ysabel se jeta sur un des plats, qu'elle dévora avec avidité. Les autres firent de mêrme et en vinrent même à apprécier ce qu'ils avalaient. 
 
Richard sentit soudain une douleur intense dans son bras gauche et s'effondra avant même de pouvoir faire le moindre geste. Ainsi que Sacha, Adrien, Ysabel et Brunhilde. 
 
Les cinq presumés morts se retrouvèrent alors dans le même espace qu'Emilie, que la blancheur de l'endroit avait finit par totalement aveugler. 

- Voyons, qui a été le plus gourmand ? 
 
Une voix caverneuse, accompagnée d'une représentation de la lune de Mélies sur le fond pixellisé, se fit entendre. Cette lune les fixa les uns après les autres et arrêta son choix sur une petite fille un peu trop attirée par la nourriture. 

- Dommage pour toi, tonna la lune avant de désintégrer Ysabel en un éclair sorti de son oeil gauche.

Emilie se releva dans la pizzeria. Les quatres autres rescapés semblaient tout aussi hagard qu'elle, et seuls les hurlements de détresse de Renée troublaient le silence.  

 

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1 avril 2013

Métro VI.

Métro VI.

 

 

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Les escaliers défilaient sans fin, et semblaient vouloir les emmener au centre de la terre. Après quelques minutes de descente parfois éprouvante, Emilie décida de marquer une des marches avec son rouge à lèvre, ayant un affreux sentiment de déjà-vu. Bingo, après quelques instants de descente la marche marquée fit sa réapparition. Ils tournaient en rond.

La jeune femme ne dit rien à ses compagnons et promena sa main sur le mur tout en descendant, cherchant une solution.
Elle perçut une inperfection et comprit aussitôt que cette malformation était en réalité une porte. Et que le reste de l'escalier ne les emmenerait nulle part.

- Venez, je crois que j'ai trouvé quelque chose !

Le reste de l'équipe s'attroupa autour d'elle et le mécanisme se mit en marche une fois qu'ils furent réunis.

La porte s'ouvrit dans un grincement sourd, et leur laissa observer avec étonnement qu'elle menait sur un restaurant italien totalement vide, mais où le couvert était servi. Pour onze personnes.

- Mon Dieu, où est-ce qu'on vient d'atterir... ?

- Chouette, des pâtes !

Ysabel lâcha la main de sa grand-mère et s'empressa de s'installer à une des tables. Elle allait enfin pouvoir satisfaire sa faim !

- Pas si vite, jeune fille.

Une voix caverneuse venait de retentir dans le restaurant, sortie d'un des haut-parleurs disséminé dans la pièce.

- Vous allez tous devoir manger, sans exception. Un des plats est empoisonné. Bonne chance !

Le jingle de la publicité Panzani se fit entendre, puis ce fut le silence. Eric sentit un frisson parcourir son échine et un vague souvenir d'une partie de roulette russe refaire surface dans son esprit. Le concept était le même.

- On va accepter ça ? Vraiment ?

Emilie serra les poings tandis que la voix refit son apparition.

- Soit vous mangez, soit vous refusez. Si vous refusez, vous mourrez. Bonne chance !

Le jingle encore et le vide. Les pleurs de Brunhilde, la rage de Richard, la résignation de presque tous les autres et l'insouciance d'Ysabel. Ils n'avaient pas le choix.

- A table, soupira Debbie en s'installant à une table.

Elle prit une part généreuse du plat et l'avala d'une traite sans qu'il ne se passe rien.

- Une chance sur dix de mourir, murmura Emilie. Advienne que pourra !

Elle mangea à son tour une part de son assiette au goût abominable et ferma les yeux...

18 mars 2013

Métro V.

Métro V.

 

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Outre cette luminosité atroce, un vent froid soufflait sans interruption et contrastait avec l'air relativement chaud au dehors. 

Emilie se sentit envahie par une rage sans nom, mais aussi par une sorte d'étrange excitation. Ce nouvel environnement ne leur présageait rien de bon, mais pourquoi ne pas en découvrir toute l'ampleur ? 

- Quelle étrange situation... Quelle logique nous a amené ici ? Qu'est-ce qu'on doit faire ?
 
Le quarantenaire avait réuni toutes leurs interrogations, mais aucune réponse ne s'imposa à l'esprit des onze autres. Il ne leur restait probablement plus qu'à poursuivre leur progression dans cet étrange univers. 
 
Brunhilde se releva et sécha ses larmes, un peu plus déterminée. Ils n'avaient pas survécu au Métro pour abandonner ici, songea-t-elle, et le sourire que lui renvoya Sacha lui mit du baume au coeur. 
- J'ai faim Mamie...
L'estomac d'Ysabel émit un petit grondement, leur arrachant à tous un sourire. Etant donné que dans cette partie il ne semblait y avoir que de l'herbe bleue et que les voitures ainsi que les logements étaient recouverts par cette étrange végétation, ils n'avaient d'autre choix que d'aller plus loin. 
 
Par un commun accord, ils marchèrent jusqu'au centre de Lille. Trois heures douloureuses, à avancer courbé par le vent et aveuglé par la lumière au sol, sans rien voir d'autre que du vert et du bleu. 
 
La topographie des lieux n'avait pas changée, mais il n'y avait toujours rien. Ni personne. 
 
Emilie était perdue dans ses pensées lorsqu'elle se rendit compte qu'ils avaient atteint la fontaine de la place, ancien symbole de sa ville tant aimée. Et qu'elle n'était pas recouverte de la couche d'herbe mais intacte !
 
Elle courut vers la structure et remplit aussitôt sa bouteille vide, morte de soif, puis releva la tête. 
 
"Pour passer, le sacrifice est nécessaire."
 
L'inscription en lettres rouges lui glaça le sang. Mais ce sentiment ne fut rien à côté de celui qui l'envahit lorsque la statue s'anima et tendit les bras vers elle. 
 
Bouche bée, ses compagnons avaient également atteint la fontaine et furent témoins de l'intervention presque surnaturelle de la géante de pierre. 
 
 - Toi !
 
La bouche s'était ouverte et avait tonné ce mot en pointant du doigt Yasmine. Et quand ses compagnons se retournèrent vers elle, il ne restait plus qu'un tas de cendre, et l'inscription en lettres rouges s'était effacée pour laisser place à un passage et à des escaliers qui menaient vers les profondeurs. Le sacrifice avait été fait.
 
Eric, pas particulièrement attaché à la femme en burqa, et surtout raciste jusqu'à la moelle, commençait à saisir. Si c'était un rêve, il était particulièrement vicieux. Allaient-ils devoir mourir les uns après les autres ? 
 
Brunhilde sentit les larmes revenir, ainsi qu'une probable crise de nerf. Mais elle serra les dents, secrètement ravie que la statue n'ai pas choisi de sacrifier un des siens. 
 
Les trois jeunes commençaient à changer leur perception des choses. Dans ce nouveau Lille où ne semblait régner aucune logique, ils se sentaient de plus en plus à l'aise. Même Debbie avait cessé depuis longtemps de se morfondre, curieuse de voir où tout ça les mènerait. Et surtout déterminée à rester en vie jusqu'à la fin.
 
Renée ne comprenait pas. Elle avait vécu la guerre d'Algérie, ayant été infirmière à l'époque, et connaissait le peu de valeur qu'avait une vie humaine. Mais elle ne saisissait pas le... pourquoi du comment ? Et surtout, elle craignait pour Ysabel.
 
Alors elle lui murmura à l'oreille qu'elles étaient probablement dans un jeu télévisé et que si elles avançaient jusqu'à la fin la petite fille aurait tellement de cadeaux qu'elle ne saurait pas quoi en faire. Ysabel, pas tout à fait convaincue, hocha la tête et décida de croire en ce que lui disait sa grand-mère. De toutes manière, qu'est-ce que cela aurait pu être d'autre, sinon un jeu ? Les gens ne mourraient pas comme ça, si ?
 
Richard ne savait plus quoi penser. Avait-il su un jour ? En tant que fils d'ouvrier, marié jeune à la femme qu'il avait mise enceinte par mégarde, il n'avait jamais eu vraiment le choix tout au long de son existence et s'était contenté de reprendre le poste de son père à sa mort, en 1999. Il avait suivi les instructions de ses parents, de ses professeurs, de ses patrons, de la publicité, d'internet. Et avait voté blanc à chaque élection. La vie lui donnait, à ses yeux, l'occasion de se débrouiller enfin par lui-même. Et il comptait bien s'en sortir sans l'aide de personne, cette fois-ci !
 
Quant à Emilie, elle se mordit la lèvre lorsque son regard tomba sur les cendres de Yasmine et se retint de verser une larme. Le SDF et maintenant elle ? Son heure allait-elle aussi venir, allait-elle se faire réduire en cendre par un métro ou une statue avide de sang ? 
 
- On y va ? 
 
La petite Ysabel avait toujours faim et elle savait que dans la partie herbeuse des lieux elle ne trouverait strictement rien. Et même si l'escalier n'était pas très encourageant, au moins il semblait mieux que ces lieux verts et bleus trop lumineux. 
 
17 mars 2013

Métro IV.

Métro IV.

 

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Il est temps de sortir, songea Emilie. Elle avait emprunté la bouteille d'eau de Richard, l'employé de bureau, et buvait avidemment au goulot. La moitié de leur équipe s'était assise contre le mur et fumait une cigarette. Les trois jeunes avaient roulé à nouveau un joint, préférant l'ivresse à la situation affreuse dans laquelle ils se trouvaient.

La jeune femme ne fumait pas, mais avait accepté la cigarette que Brunhilde lui avait gentiment tendue et savourait pleinement l'arôme de menthe que celle-ci dégageait.

Elle souffla un nuage de fumée en l'air, écrasa le mégot sous sa botte et se releva, enjoignant les autres à faire de même.

- Je suppose que nous n'allons pas moisir ici, on devrait y aller...

Ils hochèrent la tête et lui emboitèrent le pas, la gorge serrée. Les mains de Renée tremblaient et sa petite-fille avait les larmes aux yeux. La peur sourdait dans l'air, créant une tension si forte qu'on pouvait presque la toucher du doigt. Mais une autre explosion, qui cassa cette fois-ci une des vitres de la station, les fit se presser un peu plus.

Les escalators ne marchaient pas, mais les marches furent vite grimpées et le ciel fit son apparition. Vert. Le ciel était vert.

- Merde, c'est quoi ce bordel ?

De là où ils étaient, ils ne pouvaient appercevoir que cet élément et Eric crut défaillir. Il haissait tout ce qui était en dehors de la réalité, que ce soient les jeux vidéos, les films et livres fantastiques, et là... il n'en revenait pas.

- C'est... vraiment bizarre, marmonna Ysabel, la petite fille de Renée.

Emilie sourit faiblement. D'une sourire jaune, ironique et désespéré. Si le ciel était vert, qu'en était-il du reste du monde ?

- J'ai envie de voir quand même, reprit Debbie. J'ai envie de savoir !

Elle grimpa le reste des marches quatre à quatre, suivie de près par Adrien. Et leur réaction fut saisissante. La jeune fille porta une main à sa bouche et vomit aussitôt dedans, tandis qu'Adrien dut s'accrocher à la barre de l'escalier pour ne pas tomber. Emilie et le reste de ses compagnons ne purent faire durer le suspens plus longtemps et rejoignirent les deux jeunes.

Le ciel était vert, une sorte de pelouse bleue avait recouvert le sol et les maisons. Le boulevard Montebello était vide à en pleurer et la luminosité était tellement forte au niveau du sol qu'Emilie dut sortir ses lunettes de soleil pour le regarder.

- Il n'y a... plus rien ? A part cette pelouse à la con ? IL N'Y A PLUS RIEN ?

Brunhilde s'effondra et se mit à pleurer bruyamment. Ses enfants lui firent un calin pour la réconforter, tandis que les autres observaient l'étendue des dégats.

En ce 19 Mars 2013, la fin du monde avait effectivement eu lieu.


A SUIVRE.

16 mars 2013

Métro III.

Métro III.

 

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Cette fois-ci, c'était leur propre rame qui était touchée et la pagaille fut indescriptible. Pourtant, ils réussirent tous à sortir du métro sans encombre, juste avant l'explosion finale. Enfin... Tous ? Non, le SDF était resté à l'intérieur, priant son seigneur avec ferveur. Ce ne l'avait évidemment pas empêché de se faire pulveriser, laissant les autres passagers sous le choc.

- Putain... Je...

Emilie sentit les larmes lui venir aux yeux. Elle commençait à s'attacher à ses compagnons de galère, et la mort d'un des leurs ne lui laissait plus beaucoup d'espoir.

- On doit continuer ! Et ne pas se laisser abattre, on peut encore s'en sortir !

Eric avait hurlé et tentait de ne pas penser à la disparition de l'homme. Les couloirs sombres du métro, éclairé faiblement par la chandelle qu'il avait pensé à prendre avant de sortir, était on ne peut plus effrayants et l'éclat qu'il s'était pris dans la joue lui faisait un mal de chien. De plus, le sol était jonché de débris et de chair sanguinolante et il ignorait ce qui les attendait au bout du tunnel. 

- A quoi bon ?

Accompagnée de ses deux enfants, Brunhilde sentait ses forces l'abandonner. Elle avait réussi à supporter tout ça sans broncher, pour le bien de Sacha et Heidi, mais devant le couloir sa peur du noir reprenait le dessus. Elle avait envie de s'allonger sur le sol et de mourir sur le champ. De toutes manières, après la mort du SDF, elle avait compris qu'ils n'étaient pas à l'abri d'une nouvelle explosion et que celle-ci allait probablement les anéantir.

- Ressaisissez vous !

Renée, la grand-mère, lui asséna une gifle retentissante et poursuivit ses reproches.

- Ne perdez pas espoir, grand dieu, vous avez des enfants, ils comptent sur vous ! Ce n'est pas le moment de faiblir ! Nous sommes proches de la sortie !

Devant l'entrain de cette femme âgée, beaucoup moins fragile qu'il n'y paraissait, la plupart des passagers se sentirent un peu mieux.

- Euh... Madame ?

Emilie sentit qu'on tirait sur sa manche et baissa les yeux. L'un des enfants de Brunhilde, les yeux brillants, voulait manifestement lui demander quelque chose.

- Tu peux m'appeler Emilie, répondit-elle en souriant.
- Tu as encore des lumières, Emilie ?

La jeune femme fouilla son sac et sortit les trois chandelles qu'il lui restait. Elle lui en tendit une après l'avoir allumée tout en lui enjoignant de faire très attention. Sacha, le petit garçon, la remercia et courut vers sa mère. Elle en tendit une à la grand-mère et en garda une pour elle. Le couloir s'emplit d'ombres et lorsqu'elle promena son regard vers le sol, elle sentit la nausée monter.

- Bon, il est temps de nous mettre en route, reprit Eric. Si mes calculs sont exacts, nous sommes environ à 300 mètres de la prochaine station. On peut y arriver !

Les douze survivants se mirent en marche, évitant le plus possible de toucher les différents débris. Au bout d'un quart d'heure, les lumières de la station Montebello furent visibles.

Emilie soupira, rassurée. Elle avait manqué de s'empaler sur un morceau du deuxième métro qu'ils avaient croisé, une explosion de plus avait retentit et résonnait encore dans ses tympans, et ils avaient du controler la crise de panique de Yasmine, la femme en burqa, qui pleurait à chaudes larmes depuis le début de leur périple.

Eric ouvrit la porte de secours de la station, réservée au personnel, et il atterirent dans la station.

- On s'en est sortis ? C'est bon ?

Débbie, l'une des trois jeunes, se mit à rire nerveusement lorsqu'une autre déflagration ébranla les vitres de sécurité. Elle n'en pouvait plus.

- Je ne sais pas, murmura Adrien, un de ses amis. J'ai peur de ce qu'il y a dehors...

A SUIVRE.

 

15 mars 2013

Métro II.

Métro II.

 

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Une vingtaine de minutes plus tard, la situation n'avait pas vraiment évolué. Deux autres explosions s'étaient fait entendre mais un peu plus loin, et la lumière n'était pas revenue. Heureusement, Emilie avait acheté des chandelles pour son diner en tête à tête et les avait allumées et disposées un peu partout dans la rame. Ce qui lui donnait l'air encore plus lugubre.

- Mais pourquoi personne ne vient ou ne nous dit ce qu'il se passe ?

Le chef d'entreprise, Eric Laguillier, marchait le long du wagon et fulminait. Evidemment, ces pauvres gens n'y pouvaient rien mais ses nerfs, déjà à vif en temps normal, étaient en train de lâcher. Il n'y avait presque pas de solution, et les explosions lui faisaient affreusement peur. Etaient-ce les autres rames du métro qui explosaient les unes après les autres ? Si c'était le cas, il ne donnait pas cher de sa peau.

Dans l'autre rame adjacente à la leur, il n'y avait que trois personnes. Comme ils étaient séparés d'eux par les portes du milieu, ils n'avaient pas pu communiquer ensemble. De plus, depuis que les néons avaient explosé ils n'y voyaient plus grand chose.

BOUM

Emilie se mit à hurler de terreur. Le wagon d'à côté s'était détaché à l'instant et avait continué à rouler durant deux ou trois mètres pour finalement être réduit en morceaux. Le bras d'un de ses occupants avait été projeté sur la vitre juste en face d'elle et il dégoulina lamentablement avant de s'écraser sur les rails.

- CALMEZ -VOUS !

Le quarantenaire venait de se lever. Il avait compris que paniquer ne servait strictement à rien et tenta de rétablir l'ordre avec un relatif succès. Sa voix forte stoppa un instant les cris et les pleurs.

- Je ne sais pas si vous vous en rendez compte mais les explosions ne détruisent qu'un wagon sur les deux présents. On l'entend au son qu'elle font, il n'y en a jamais eu deux au même endroit. Nous sommes en sécurité, tout du moins pour le moment ! Alors essayons de nous en sortir au lieu de braire en attendant la fin !

Son discours eu l'effet escompté pour presque tout le monde. Le SDF priait toujours, et les trois jeunes avaient cessé de rire depuis un bon moment. Totalement redescendus de leur trip, la seule fille de leur groupe éclata en sanglot et se nicha contre un de ses amis qui lui tapota l'épaule amicalement.

- Quelqu'un aurait de quoi casser une porte ? Un pied de biche, n'importe quoi...

Emilie avait également réussi à calmer sa peur et reprenait les choses en main. En école de communication, elle savait qu'elle avait le pouvoir de mener ces gens quelque part, et qu'ils avaient une chance de s'en sortir.

- J'ai une perceuse, murmura le SDF, interrompant ses priéres.

La jeune femme ne chercha pas à comprendre le pourquoi du comment et saisit l'appareil, par chance à batterie, pour desceller les portes étanches du métro. Elles se séparèrent dans un bruit presque insoutenable, masquant celui de l'explosion de la rame après la leur.

- J'ai besoin d'un coup de main !

Les hommes s'avancèrent, ainsi qu'un des jeunes aussi musclé qu'un taureau, et forcèrent sur les portes pour les ouvrir un peu plus. Après une dizaine de minutes d'effort, ils étaient libres. Et une autre explosion retentit.

A SUIVRE

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